Chuuut…
C’est une émission de télé de l’heure du déjeuner et la séquence s’appelle « Yoga devant la télé ». L’intitulé, déjà, ne laisse présager rien de bon, les mots « yoga » et « télé » sonnant comme un oxymore. Cinq/six personnes sur le plateau, dont un très sympathique coach qui explique que nous souffrons tous de tensions, (jusque-là rien à dire), et que, pour libérer nos tensions, on peut pendant qu’on regarde la télé, faire quelques mouvements de yoga. Il a bien dit « Yoga ». Donc on lève le bras droit et on étiiiiiire le côté droit.
Tout le monde s’exécute – le mouvement est plus qu’abordable – dont un monsieur en cravate un peu plus âgé que les autres, qui penchent en quasi-apnée. « Ça va Gérard ? » s’inquiète la présentatrice. Gérard est OK et le fait savoir. On étire à droite, on étire à gauche et on passe à l’étape suivante. On pose la cheville droite sur le genou gauche. « Ça se corse » dit un jeune homme, prétextant son jean trop serré. Gérard cale, le coach lui propose une version plus light.
La présentatrice, dont le réservoir d’enthousiasme semble inépuisable, s’emballe : « Allez ! Faites ça chez vous !! Et puis envoyez-nous des photos, hein ?
C’est un petit moment de télé, sans prétention, sans beaucoup d’intérêt non plus il faut bien le dire, sinon de révéler en filigrane quelque chose de plus vaste : cette invraisemblable capacité que nous avons de submerger nos vies, nos temps libres, nos espaces mentaux, d’informations, d’injonctions, d’exercices en tous genres, comme si le moindre temps « mort » nous était insupportable. Nous explosons jusqu’au burn-out, mais il faut encore, devant la télé, faire de l’exercice, et en plus nous prendre en photo, et en plus « partager »
bien sûr, parce que, tout de même, ça n’est pas rien.
On sait pourtant combien le cerveau a besoin de ces temps de repos, de suspension. Non seulement pour s’extraire de nos épuisantes routines et mémoriser les informations, mais pour ouvrir de nouveaux espaces de réflexion, pour permettre à de nouveaux comportements d’émerger, hors de ce qui nous est connu, familier, et pour rêver. Nous sommes arrivés à une société où le fait de prendre ¼ d’heure pour soi, sans courir, sans but, est devenu un challenge de plus, où la perspective de manquer quelque chose – un texto, un mail, un appel – nous remplit d’une angoisse permanente, où ce temps de silence dans la folie du monde fascine autant qu’il terrorise.
Alors je vous recommande de prendre juste cinq minutes sur votre canapé sans RIEN faire.
Juste respirer et ressentir le temps qui passe.
Et puis envoyez-nous des photos, hein, on compte sur vous !
Article rédigé par Marie-Paule Faure, enseignante en méditation chez Qee. Retrouvez-la en visio le jeudi soir pour des séances de méditation.
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