En 2014, le journal Libération publiait un portrait du cinéaste chinois Tsai Ming-liang, que je ne connaissais absolument pas, mais dont le titre, extrait de son interview, a résonné en moi comme un choc :

« La lenteur est la meilleure façon d’exprimer ma révolte ».

« C’est dans la lenteur que je puise ma force rebelle. Le monde exige toujours plus de vitesse, c’est devenu une contrainte majeure de la vie moderne et mon but de cinéaste est de me libérer de toutes les contraintes. » Et plus loin : « Rebelle, (…), ce n’est pas tout casser, c’est quitter les chemins rigides et sécurisants ».

J’ai gardé cet article religieusement car dans ces mots, j’ai trouvé les lettres de noblesse d’une tendance à la résistance qui m’habite depuis si longtemps et qui, pendant des années, n’a pas trouvé d’écho. Résistance au culte de la performance, à la glorification du travail forcément libérateur, à l’éclatement de l’attention dans la valorisation du « multitâches », voire de l’épuisement comme signe de dépassement de soi. Lorsque la méditation, le « lâcher-prise » et le fait de prendre « un temps pour soi » n’étaient pas encore « à la mode ». Longtemps, je me suis sentie en décalage en revendiquant un besoin d’intériorité, d’arrêt sur soi, de temps immobiles, ce n’était pas dans l’air du temps.

Lorsqu’on me demande aujourd’hui ce que la méditation m’a apporté, même si la question est difficile tant la pratique a infusé dans ma vie, je réponds que la chose la plus importante que la méditation m’a apprise, c’est d’être capable – du moins un peu plus facilement – de dire non. Ce n’est pas une boutade. Dire NON est une des choses les plus difficiles qui soient, tout comme dire oui en pensant non. Il y a un monde derrière un NON, un chemin de résistance, un chemin, long et sinueux vers le respect de soi et de sa singularité.

La pratique de la méditation, en ce qu’elle nous amène à observer encore et encore nos comportements et ce qu’il faut bien appeler nos mécanismes d’aliénation, nous permet d’acquérir une conscience aigüe de la manière dont nous nous plions depuis l’enfance à des injonctions jamais contestées. Nous sommes prêts à aller jusqu’à l’épuisement pour ne pas décevoir quelqu’un, pour ne pas déplaire, ne pas être rejeté, pour respecter des allégeances arbitraires, obsolètes, qui entament nos forces et notre vitalité. Dire oui en rêvant de dire NON accentue cette fracture en nous qui nous éloigne de nous-mêmes, de nos aspirations profondes et nous coupe en deux. L’incapacité à dire NON nous ramène à l’impuissance du petit enfant.

La méditation ne fait pas de nous des ravis de la crèche, mais au contraire, avec le temps et l’entrainement, nous rend plus aptes à faire face aux souffrances que toute vie traverse, plus homogènes face à la dualité, plus combatifs face à l’adversité. Car une des questions fondamentales qui émerge de la pratique méditative est, à mon sens, celle-ci : qu’est-ce qui, en moi, pense à ma place ?
Peu à peu quelque chose en nous s’unifie, se renforce, peu à peu se dessinent alors plus clairement les frontières de notre territoire, les contours de nos limites deviennent plus précis.
Et peu à peu émerge la force de les faire respecter, d’affirmer ce que nous sommes, profondément. Quitte à oser sortir du rang, de la place qui nous a été assignée, à quitter, et c’est notre force, les « chemins rigides et sécurisants ».
Article rédigé par Marie-Paule Faure, notre enseignante en méditation.

Retrouvez-la le jeudi soir pour des séances de méditation en visio.

Pour vous initier à la méditation, prenez un instant pour écouter ce vocal :

Pour réserver votre cours